Le Moiré ottoman

Le Moiré ottoman (Erebia ottamana tadernota) une espèce « réfugiée » en Cévennes

Les Moirés sont des papillons diurnes présent principalement dans les régions arctiques. Sous nos latitudes ils se retrouvent principalement sur les zones montagneuses.
Grâce à ses altitudes élevées, le département de la Lozère compte 8 espéces de moirés. L’une d’entre elle, le Moiré ottoman, se révèle particulièrement intéressante par sa répartition géographique. Sur le territoire métropolitain, il n’est recensé que sur 3 départements (l’Ardéche, la Haute Loire et la Lozère) et semble se cantonné uniquement au niveau des plus hautes altitudes bordant le décrochement cevenol, soit de manière discontinue du Mont Mezenc au Mont Lozère. Pour être exhaustif, on rencontre également ce papillon de manière isolé dans les Alpes italiennes, dans la péninsule balkanique et au nord de la Turquie.

Son écologie

En Lozère le papillon est présent au niveau des lisières forestières d’altitudes, des landes bien pourvues en graminées et de certaines pelouses à nard. Les poacées seraient la base de l’alimentation de la chenille comme pour la majorité des autres espèces du genre Erebia. Il fréquente uniquement les altitudes élevées de l’étage montagnard supérieur à l’étage subalpin (1300m. à 1600m.) .

Les conséquences des variations climatiques passées sur sa répartition géographique actuelle

L’ère quaternaire a été marquée par l’alternance de période glaciaire et interglaciaire. Sous nos contrées, les périodes glaciaires étaient favorable à la présence de milieux herbeux froids. Ces conditions ont certainement favorisé l’extension géographique des moirés. La donne changeait fondamentalement lors des périodes interglaciaires, où les ensembles forestiers gagnaient du terrain. Les moirés devait se dépalcer vers plus hautes latitudes ou monter en altitude pour retrouver des conditions propices. Cette situation conduisait inévitablement à l’isolement de plusieurs populations et pouvait amener dans certains cas à l’apparition des nouvelles espèces si la situation se prolongeait. La période glaciaire suivante favorisait à nouveau l’extension des moirés.
Le moiré ottoman serait apparu de cette manière dans le nord de l’Italie (Albre Jérome, 2007) il aurait profité de la glaciation du Riss il y a 300 000 ans pour s’étendre à travers l’Europe méditerranéenne. La dernière période interglaciaire débutée il y a 10 000 ans l’oblige une nouvelle fois à remonter en altitude à la recherche de milieux propices. Il se retrouve isolé sur les plus hauts sommets (Mont Lozère…). Les activités humaines et les défrichements qui ont suivi, auraient créé des habitats recherchés par l’espèce. Il est probable que ces nouvelles conditions lui ai permis d’étendre sa répartition sur notre département (Plateau de Charpal, Forêt de Mercoire, étage montangard du Mont Lozère).

Les menaces

Les habitats naturels utilisés par le moiré ottoman tendent à se réduire depuis quelques dizaines d’années.
La principale cause identifiée est le reboisement des zones sommitales. La création de prairies temporaires ou de culture à gibier impactent une surface moindre mais viennent accentuer une situation de moins en moins favorables à l’espèce.

La gestion mise en place par le conservatoire

Dans le cadre du Plan Loire Grandeur Nature, le CDSL à mis en place en 2010 un partenariat avec Michel Rocher sur la commune d’Arzenc de Randon.
Plusieurs individus de l’espèce ont été aperçus sur les parties sèches de la parcelle. Ces mêmes zones on été concernées par des travaux de restauration à l’automne 2011. Ils ont permis d’éclaircir une zone pâturée largement boisée de Pins sylvestres. Si l’objectif initiale était de privilégier le pâturage hors de la tourbière située en contrebas en favorisant la pousse de l’herbe. Ces travaux devrait également être bénéfique à l’espèce en favorisant son milieu. La mise au pâturage tardif (mi-juillet) permettra également au papillon d’effectuer la majorité de son cycle sans la présence du bétail.

Le suivi et la prospection

La situation du Moiré sur ce site sera évaluée lors des suivis de la végétation programmés tous les deux ans. D’autres sites sous convention, également propices à la présence du papillon, seront parcouru à la bonne période avec une attention soutenue.

Bibliographie :

Albre Jerome, Le Complexe Erebia tyndarus (Lepidoptera, Nymphalidae) : Biogeographie, Evolution et Théorie des refuge froids interglaciaire, 2007, 142p.
Lafranchis Tristan, Papillons d’Europe, édition Diathéo, 2007, 379p.